Le feuilleton des Initiatives d’Excellence (IdeX) continue comme il avait commencé : dans l’opacité des décisions et avec la volonté de ne sélectionner qu’un tout petit nombre de projets, donc d’écarter l’immense majorité des personnels, des étudiants et des territoires.
Le 2e tour de présélection a notamment vu les candidatures de grands ensembles universitaires comme Lille, Montpellier ou l’alliance Nantes-Rennes-Angers-Le Mans, être écartées ; des pôles importants de l’enseignement supérieur et de la recherche comme Caen ou Limoges n’avaient même pas tenté de monter un dossier. Ainsi, si le projet d’ensemble des IdeX allait à son terme, le potentiel de recherche de régions entières se trouverait gravement affaibli. En acceptant que des pôles universitaires majeurs soient ainsi oubliés, le gouvernement prépare – sans jamais le reconnaitre – la rupture du lien de la recherche avec la plus grande part de l’enseignement supérieur, à rebours de l’idée même d’Université. De plus, l’Ile-de-France semble partie pour se tailler une nouvelle fois la part du lion, ce qui accentuerait la concentration déjà excessive du potentiel de recherche français (40% de l’ESR sur un territoire pesant à peine 19% de la population).
Mais même pour les pôles déjà dotés ou encore en lice, la pilule va se révéler amère.
Tout d’abord, les financements promis risquent de se faire attendre longtemps. Le plan campus est à cet égard éclairant, avec une somme de 5 milliards d’euros annoncée urbi et orbi en 2007, pour à peine plus de 300 millions versés à ce jour. Et à l’heure où on ne parle que d’autonomie, on découvre que les IdeX vont être en permanence évalués et réévalués – avec notamment une période probatoire de 4 ans, ce qui reviendra de fait à leur retirer toute indépendance face aux desiderata du ministère.
Surtout, les IdeX n’intègrent par construction qu’une fraction du potentiel de recherche des sites sélectionnés. A terme devraient ainsi cohabiter sur les mêmes pôles les quelques rares équipes bénéficiaires de ces financements et un grand nombre d’équipes dont la sous-dotation ira en empirant – l’analyse détaillée des budgets du Grand Emprunt démontre que les fonds promis au titre des IdeX proviendront de diminutions budgétaires pour tous les autres. A cette situation détestable s’ajoute le fait que chaque IdeX constitue une structure entièrement nouvelle et fortement intégrée, ce qui alourdira la création de nouvelles collaborations hors de son périmètre, et sera donc un frein à la dynamique de recherche.
Au final, le concours des IdeX ne fait que des perdants, entre les recalés démunis et les gagnants isolés dans leur propre territoire et soumis à un contrôle renforcé du pouvoir politique. Les IdeX s’avèrent n’être qu’un outil de concentration des moyens et de contournement des instances démocratiques de l’ESR, qui compliquent un peu plus un paysage rendu fort confus par les vagues de réformes imposées par la droite depuis le « pacte pour la recherche » de 2006.
EELV demande l’arrêt de la mise en oeuvre des IdeX et une remise à plat générale des financements liés au Grand emprunt. Une politique écologique de l’ESR doit participer intelligemment à la décentralisation en permettant à chaque région de disposer d’activités de recherche au meilleur niveau international, le fonctionnement en réseau territorial, via des Pôles de Recherche et d’Enseignement Supérieur rénovés et démocratiques, permettant d’éviter l’écueil du saupoudrage.